Les dits du corbeau noir

Poème amoureux.... "Mona" et "lettre à la bien aimée" bran du

l'Album Bran du Octobre 2013 A Mona, en reconnaissance....

 

Je me souviens...


Il y avait ce figuier exhalant un parfun séducteur de sens et ces lézards qui couraient sur le mur entre ombre et lumière...

L'ombre et la lumière dansaient aussi sur ton corps nu imprimant en ombres chinoises les feuilles dansantes du figuier....

 

Le soleil était pur, drapé de bleu, vierge de tout nuage et dardait de toute son ardeur sur la Beauce alanguie...

 

La maison aux tuiles rouges, aux volets blancs, abritait notre séjour complice, notre jardin des merveilles, nos jungles éblouissantes, nos contrées soyeuses et intimes, nos greniers d'enfance, nos rires champêtres... Le tilleul lui-même riait de toutes ses branches et nous enveloppait d'une douce senteur d'entendement et de complicité tacite...

 

Tu étais là, posée sur la table ronde, au centre de celle-ci, comme l'aurait été un vase

contenant l'été en bouquet... L'ocre de ton corps, le brun rose de tes seins faisaient à ce vase une parure d'émail et de terre cuite avec des pigments de Provence... La Terre avait un centre et ce centre avait un coeur qui rayonnait sa joie et sa beauté et tu m'offris le coeur du tournesol, l'amande douce de ta gangue et ce mot qui chuta dans l'étang du temps pour nous embraser de ses cercles concentriques...

 

Les bourdons visitaient les buissons, fleur après fleur, et s'enivraient du pollen bue aux calices offerts... Mes lèvres, ma langue, avaient commune ivresse en ce jardin qui souriait tout entier devant mes yeux humides de rosée, devant ma bouche emmiellée de toutes tes sèves...

 

Le banc épousait ton dos en une courbe voluptueuse.. Tu cambrais ta poitrine d'aube éclatante ; la pointe de tes aréoles dardait son bourgeon pour nos cris à éclore...

 

Ton chapeau de paille et son ruban fleurit gisaient là, à mème l'herbe rase, près de ta robe blanche et de son parterre d'avril... Leur chute délicate avait signé le pacte, avait clamé l'acceptation et l'offrande, avait ouvert le rideau sur la scène d'un monde où se produisait enfin le miracle de l'Amour...

 

Chaque geste, nè du désir, était geste de grâce convié au verger du chant et du silence, dans une chorégraphie de retenues et d'élans, de courbes et de spirales, d'envols et d'enfouissements, de murmures et de clameurs, de souffles et de râles,

d'éclats et de gémissements...

 

Le soleil lui-même tournait autour de nos corps encorbellés, prélevant ses caresses dans le repos du jouir....

 

Immense était cette prairie frangée d'une eau paresseuse, profuse la ronde des cosmos qui en ceinturait l'aire... Notre peau frémissait bien plus que le fait des hauts peupliers désertés de vents libertaires et obstinés....

 

Les herbes folles se sentaient bien sages au regard de ta chair tremblante et frissonnante de plaisir...

 

La rivière se souvient-elle, dans la courbe languissante de son cours, dans l'arrondie profond de ses berges parsemées de myosothis et de jaunes iris, de ton bain de jouvence et d'avoir moulé ta taille, tes hanches et tes fesses et entouré le buisson de ton sexe de ses fluides baisers ?...

 

Tu chantais avec elle une musique d'algues et de mousses, d'aulnes et de renoncules d'eau... Tu étais de cet écoulement, de cette limpidité, de cette clarté et de cette transparence dont la rivière faisait ode ruisselante sous le balcon de juillet...

 

Toutes les plantes de la rive se courbaient vers toi imitant ton dos ployé dans l'onde claire...

 

Fontaine était tes cheveux qui innondaient mes tempes et de nacre ta nuque de moules d'eau douce...

 

En toi, je prenais source...

 

Par toi j'ai connu la rose sans ses pétales, le noir de son rubis, le rouge de son ivoire...

 

Tu passais tes bras d'envies autour de mon écorce d'homme et la résine pleurait de tendresse en nos sous-bois obscurs et délicieusement troublés...

 

Tu n'étais que lumière qui absorbait mes ombres, que ce midi d'extase au cadran de nos heures phantasques et fécondes....

 

Un corbeau faisait son nid dans le noir de tes sourcils et tu lissais ses plumes d'un geste grave, solennel et appliqué de Madone...

 

Tes lèvres entrouvertes respiraient ce bonheur que d'autres lèvres, resserrées sur le tison de chair et de braise, conduisaient à leur seuil....

 

Le monde était si loin et le nôtre si près qu'il tenait dans la paume de nos mains jointes d'évidence...

 

Il est une beauté ; féminin est son prénom, qui vous fracasse l'oeil et le roule sur la peau d'une grève étendue à l'infini, offerte à l'absolu... Elle vous fait l'oeil rond comme l'apogée de l'astre qui ordonne à la mer de retirer sa jupe dans le baissant

des forces opposées à la vie...

 

Le corps d'une femme, que déflore le printemps et qu'emblave l'été, est plus qu'un corps, plus que le polissé d'un galet arrondi par les siècles, plus que les libellules d'or et de vermeille, plus que la souche d'où jaillire les forêts, plus que le puits qui défi tout désert, plus que la neige au plus haut des sommets, plus qu'une alouette dans la verticale du ciel, plus qu'un essaim d'abeilles dans le rucher des amants, plus que la grenade ou la figue éclatée délivrant, en ses chairs, le suc sans pareil...

 

C'est l'étoile de mer cachée sous la pierre heureuse de l'enfance...

C'est un chaton aux yeux bleus d'innocence...

C'est un soleil couchant qui se relève en la nuit...

C'est le sang qui bat, qui lutte sans merci...

C'est un roseau pensant qui rêve de ta rivière....

C'est la sueur salée qui perle du bec de l'alambique qui transforme le temps en espace...

C'est une brassée de laminaire qui te fait sur la poitrine comme un corsage mauve...

Ce sont nos yeux qui se ferment pour mieux savourer le feu qui nous consumme...

C'est un poème écrit au piano à dix mains...

C'est le lin qui nous fait un gisant à nos pieds...

C'est cette neige qui soudain tombe sur l'incendie des corps...

Ce sont les Mauves (joili nom pour une rivière courante) qui serpentent vers la Loire emportant avec elles tes cris d'hirondelle...

C'est une frairie de jeunes vierges qui s'ébattent dans le pré, prenant ton prénom dans leur ronde...

C'est, sur ta peau, un chapelet de grains de béatitude...

C'est une brassée d'extase dans le vase de l'instant...

C'est ton âme célébrée sur l'autel des offrandes...

C'est ta robe ouverte sur un abysse de désirs, sur des abîmes de délices...

C'est une chute de reins qui pénètre et fracasse le lac du silence.

C'est l'amour qui se repose au lit de la béatitude...

C'est le ravissement des rondeurs épanouies...

C'est le fuit d'amour qui remercie l'arbre , ses racines et sa sève...

C'est ce corps offert comme une grappe de raisin...

C'est le velouté d'une pêche qui fond sous la langue...

 

Le marais s'en souvient, les arbres en ont mémoire et par les nuits d'hiver ,se rappellent ce jour où un chant d'amour leur fut un chant de gloire...

 

Le souvenir est une fontaine où le temps lui-même vient boire !...

 

Mona était ton nom ciselé d'obsidienne et serti d'un diamant qui m'était un regard

venu de l'Univers...

 

Ce n'est que plus tard que j'ai su avoir bu parmi le troupeau des étoiles en un quartier de lune amoureuse du soleil...

 

La porte de l'ancienne bergerie n'avait du connaître de sa vie, si jolie bergère

pour qui le ciel offrait au blanc troupeau des nuages, un long ruban rose...

 

Pierre après pierre, les maçons avait bâti la longère, cherchant l'ajustement et la plus parfaite position... Il me semblait que nous avions fait semblable ouvrage, recherchant avec soin et parfois à tatons, le meilleur assemblage !...

 

Plus tu montais l'escalier et plus la lumière venait à ta rencontre...

Les tuiles se demandaient : “ - Mais où donc est la noce ?”...

Le jour n'avait regard que pour ton caraco et les vagues fleuries de ta jupe...

Le vent se surprenait d'aise dans la voile sans mât qui flottait dans l'espace...

 

Assise au pied de l'arbre, à la décrue de ce jour, le soleil, devant toi, se trancha toutes ses veines, devant t'abandonner à l'amant de ta nuit...

 

Tu allais, princière, parmi les achyllés et les séneçons, portant, plus noble que les genets, ta grâce d'ombellifère...

 

Alors que tu étais allongée sur la mousse dans le bosquet de pins, la clairière pétillait de conciliabules chuchotés par les dryades et amadryades qui n'avaient jamais vu une blancheur si radiante émanant d'une femme...

 

Jamais cerises sur un chapeau n'avaient vogué sur l'eau, sur un charmant vaisseau en tenue de naïade !...

 

Tout le marais, la prairie en son assemblée, se demandaient : mais qu'est-ce que cela ?

 

Cela, c'est la femme que j'ai aimé et dont le souvenir me restitue à ses bras...

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Une lettre à la “bien-aimée” Bran du 14 10 2013

 

J'écrirais bien une lettre à ma “bien-aimée”, mais je n'en connais la destinataire, si ce n'est Dame Nature et Dame Poésie, qui discertent sur le banc de la joie, dans le jardin paisible, sous le hêtre pourpre du jour, sur l'homme qu'elle aimerait inviter au Grand Bal de la Vie...

 

J'aimerai, oui j'aimerai, avec frémissement et fébrilité, coucher sur le papier la longue robe d'un rêve et la chevelure rousse et soyeuse d'une pensée...

 

Mais que pourrais-je lui dire à cette fiancée des songes qui puisse être entendu et compris au-delà et par-delà une réalité qui distend et sépare, mutile et exclus ?

 

Que faire de ce bouquet de fleurs des champs qui sont autant de mots qui fanent en silence ?

 

Je creuse depuis si longtemps un sillon dans le sable des dunes de l'existence afin que l'eau de mes désirs puisse enfin se jeter dans les vagues d'un océan d'entendement...

 

J'appele Celle !.... J'appel, au foyer de mon coeur, dans les branches mortes de mes attentes, parmi les résines de mes blessures, la grâce de l'étincelle !...

 

J'ai cru souvent, et je ne sais plus que croire, qu'un coeur était un aimant amant

irradiant de bonté et de tendresse et que son flux magnétique était en mesure d'attirer à lui la sympathie solaire et flammée d'une correpondance amoureuse apte à concélébrer les noces de la Vie !

 

Ce serait, cela aurait été, une lettre pour l'Etre venu à la rencontre et se rencontrant soit même au plus profond de son ignorance, de ses braises, de ses feux, de ses flammes... De son âme !...

 

Miroir et reflet confondus dans un même regard porté sur plus haut que soi , plus large que soi, plus dense que soi... Plus infini, plus absolu, plus immense que soi...

 

Le “nous” qui se noue, dénoue tous les lacets de l'âme !

 

J'ai enfilé des perles de consonnes et de voyelles sur le collier du dire, mais je n'ai su trouver de cou, de nuque et de poitrine pour le faire briller de mille éclats !...

 

Ai-je chanté trop fort là où seuls le murmure et le chuchotement pouvaient trouver passage vers l'écoute attentive de celle qui s'ouvre à ce léger flux, à cette douceur d'onde, aptes à remplir sa fontaine accueillante et ce, jusqu'au débord de l'amour ?

 

Je suis dans ce reflux des lames qui écument sur la grève de l'attente...

 

Au large de l'espoir, ma barque d'amour a fait naufrage... Il arrive ainsi et parfois que “sombre” la lumière ! ...

 

Oui, je suis las de ce veuvage qui me laisse comme une voile sans mât et sans étoile...

 

Que faire lors de cette conviction qu'il n'est de véritable bonheur que celui qui est partagé au plus intime de l'autel et de ses offrandes ?

 

L'amour ne manque pas, il me submerge et se déploie en mille envols, en mille contrées, comme des semences confiées aux vents sillonnent les terres inconnues

avant de trouver un berceau où se poser...

 

Sur les parois du doute résonnent mes appels... Je guette l'écho qui reprendra mon chant pour l'amplifier d'amour...

 

Mon vin cherche la coupe et ma joie le calice....

 

Je ne sais retenir en moi l'écoulement et ses eaux bondissantes, mais les voici au coeur d'un marécage se mêlant à la boue qui sèche dans le temps.. .

 

Je sais lever mes paumes vers le ciel et creuser mes mains pour recueillir les larmes de la terre.

 

De la Nature j'ai appris, de la Poésie, j'ai appris, de la Femme, grandement aussi....

Par tout cela j'ai connaissance et louange dans le merci...

 

Mais l'arbre que je suis s'attriste et déplore de voir, à ses pieds, en sa rousse saison d'homme, le pourrissement de ses fruits !...

 

Depuis si longtemps que je tresse la corbeille... Depuis si longtemps que je dépose le vase bleu et or sur la table, que je couds sur la nappe blanche les couleurs du festin...

 

J'ai entrebaillé ma porte comme on ouvre ses deux bras, j'ai appris aux rideaux, aux géraniums, aux fuschias, le mot de bienvenue, mais le seuil est là où repose la lumière que ne franchit “l'attendue” !

 

La vie m'est compagne et je ne saurai jamais m'en plaindre... Je lui suis fidèle

Et servant autant qu'il m'est possible... Mais le “possible” souvent me ment et parfois, me fait mentir !...

 

Il est des chevaliers errant de part leur landier, leur futaie et leurs ombres, déchirés par les ronciers de la quête, leur visage empoussièré et asséché par la rudeur des routes, chutant et se relevant parmi les profondes ornières des sentes labourées d'incertitude... Ils vont sur leur destrier d'espérance, talonnant leur propre flanc, la mort parfois aux dents mais carapacés de soleil et de lune n'ayant comme horizon que cette étoile entrevue jadis au front de la Dame ; de cette Dame qui est autant promesse que tourment.....

 

Je n'ai en ce qui me concerne ni étalon ni jument... Je vais à pieds, clopin, clopant, au devant de ce qui devrai être, pourrait être, avec bien des “cependant”.... qu

 

Quelle peur, quelle appréhension, quelle réticence, quelle méfiance, quelle hésitation entre “Elle” et ce moi qui se veut moins que soi pour la complétude de l'autre ?

 

Suis-je sentimentalement innaccessible par cette exigence à être trop ceci ou trop cela, là où l'on souhaite un peu de ceci ou un peu de cela ou un peu des deux ?...

 

Trop de hauteur, trop de profondeur et pas assez de juste milieu ?...

 

Entre le coeur du ciel et le coeur de la terre, parmi l'écrin de nuit et le coffret du jour, bat le coeur d'un homme qui bat de son mieux.... aux rythmes de l'amour....

 

Mes lèvres, mes “orphelines”, je voudrais vous offrir de l'attendue, le baiser !...

 

Mais je ne puis verser sur votre parvis, la fontaine de roses, le jasmin de la vie....

 

Je suis, me semble-t-il, comme un arbre dans le désert qui mystérieusement trouve encore de l'eau pour sa survie... Mes branches aussi sont désertes de chants et de nids....

Toutefois, j'offre encore un peu d'ombre aux trop vives lumières, aussi se font-elles douceur au sein de leur meurtrière ardeur...

 

Hélas, nulle voyageuse, près de mon tronc craquelé, ne sait assise pour reposer sa vie de ses marches indécises et se rassasier d'une sève réapprise sous l'écorce de la bonté....

 

Je n'ai saison de femme à la fourche de mes branches....

 

L'automme et l'hiver ont kidnappé le printemps et l'été et font l'année à leur triste mesure....

 

Alors, pourquoi vouloir rédiger, encore et encore, une lettre pour l'être à aimer ?

 

Je sais, depuis assez longtemps, que je ne suis pas fait pour la vie érémitique ; non pas que l'isolement en milieu sauvage et naturel me soit désagréable, bien au contraire, mais l'exaltation de sens que produit une telle immersion ne saurait trouver à s'épancher autrement qu'en vers libres de toute contrainte... Ce qui n'est pas une moindre satisfaction, mais celle-ci ne saurait estomper bien d'autres savoureuses et voluptueuses complétudes que seule une compagnie féminine serait en mesure d'exalter mutuellement...

 

Si je pouvais donner à ce projet une destinée ; ce qui suppose une adresse et donc une destination, que pourrais-je bien signifier, formuler, exprimer, décrire, traduire, projeter, concevoir, ébaucher, inventer, proposer, créer, élaborer, qui puisse toucher, émouvoir, sensibiliser, intéresser, troubler, ébranler, percuter, foudroyer, les volets d'un coeur jusque là réticent, rébarbatif, peu disposé, peu enclin, réfractaire, rétif, à toute ouverture qui soit de nature à faire entrer, pénétrer, sourdre, s'immiscer, s'infiltrer, une soudaine et bouleversante clarté là où règne l'ombre à satiété ?... (Soit l'art de dynamiter la peur et de faire sauter l'ignorance !)...

 

Je ne vous connais pas, nous ne nous connaissons pas, et pourtant nous avons à signer ensemble un acte de naissance... Nous avons à apposer un sceau sur le parchemin (heureux d'être froissé) de notre peau scellée d'évidence... Nous avons à faire contresigner ce document émouvant et mouvant par une ambassade de vagues écumeuses afin qu'elles y déposent leur sel ; ce sel blanc comme un oeillet accroché à la pochette des mariés qui sourient au monde en absence de tout photographe, mais en présence de milliers d'yeux invisibles qui se trahissent dans le rire des herbes folles et des branches échevelées qui agitent leurs rubans comme sur un quai de gare...

 

S'il est une personne aimable, que je puisse donc aimer, elle m'aiderait et referait lecture de ce qui précède en détachant chaque mot, chaque lettre et en remplaçant subtilement le vouvoiement par le tutoiement, ce qui serait déjà un signe certain et prometteur de rapprochement souhaité et souhaitable....

 

Un jour, un soir, l'inconnu frappe à votre porte... Ce n'est pas le vent d'hiver ni la bise printannière, ce n'est pas un merle moqueur ni une mésange frivole... C'est une aube ou bien un crépuscule et peut être même une curiosite peu ordinaire : une aurore crépusculaire ! ... Cela sent le pain rond sorti du four... C'est comme une sucette à la menthe sur son petit bois d'adolescence... C'est une envolée d'hirondelles criardes... C'est un vieux conte qui a perdu les lèvres de son conteur... C'est une malle de voyage qui soupire au grenier des poussières... C'est une icône qui ne sent plus la cire... C'est une guitare qui a mal à ses cordes... C'est un poème sans ponctuation qui voudrez bien faire le point... C'est une main tendue dans le vide...

C'est un chant accroché aux branchages électriques... C'est un mendiant avec des gants en or... C'est une bulle échappée d'une bande dessinnée... C'est un miroir tout noir, tout noir... C'est une peluche sans yeux, sans bouche, sans nez, sans oreilles, sans bras ni jambe, si usée d'amour mais si douce au toucher... C'est l'anniversaire de tous les anniversaires oubliés... C'est Paris sans l'île de la Cité... C'est Jean Valjean sans Cosette, la Belle sans la Bête, Tristan sans Yseult... C'est midi et ce n'est pas midi... C'est l'arbre sans fruits qui pleure de toute ses feuilles dans les bras de l'automne... C'est lundi et c'est déjà la fin de la semaine... C'est un souvenir qui ne supporte ni les albums ni les cadres... C'est un visage sans nom, mais qui ressemble à une étoile... C'est un verger au bord de la mer et un jardin amoureux d'une île... C'est une dentelle blanche sur le front baissé de la mort... C'est un accord qui n'a jamais trouvé sa conclusion... C'est demain et plus loin encore... C'est ce mot que j'ai cherché partout sans savoir qu'il dormait sur le cousin brodé par ton coeur... C'est une chatte qui a fait ses petits et les amène dans ton lit pour s'octroyer un peu de repos... C'est la lettre expédiée avant hier et qui n'a de contenu que le sable fin d'une rivière... C'est une histoire sans commencement ni fin qui tourbillonne avec le manège des enfants dans le petit square où les grand mères remplissent la gamelle des souvenirs comme on donne à manger aux chats errants...

C'est un colis ou un petit paquet qui s'est trompé de destinataire tout en ne se rappellant plus le nom de son expéditeur... C'est moi avant d'être soi...

C'est un dimanche de pâques sans cloches au rendez-vous... C'est toi, c'est moi, c'est nous, c'est vous, toujours en attente de résurrection... C'est un rond dans l'eau qui a gelé dans le désert de la parole... C'est la lune perplexe devant un calendrier solaire... C'est l'homme sans humus ni terreau, mais qui cherche ses racines...

C'est l'aveugle qui te fera traverser l'autoroute des “comment” et des “pourquoi”...

C'est une robe rouge qui valse devant juillet... C'est un cerisier qui offre son bouquet... C'est une mélodie égarée dans les brumes d'un rêveur et qui retrouve son chemin grace au marteau de la forge d'un penseur... C'est le blé, c'est le seigle et c'est l'orge que les oiseaux engrangent sous le duvet des rigueurs... C'est comme un coeur, du moins cela y ressemble, mais sans ce battement pour lequel se rue le sang des conflits et des guerres... C'est un tableau sans forme ni couleur dont le pinceau s'est figé dans le vernis des heures... C'est la promesse tenue par un matin de janvier de s'offrir un collier de glace et de neige...

 

C'est un chrysanthème qui ne veut pas passer sa vie dans un cimetière...

 

Alors oui cela fait du monde à sonner sur le bois au palier du possible....

Et encore, de surplus, tous ne sont pas venus, trop employés à se soustraire à cet inventaire autant poétique que farfelu !



21/10/2013
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